Bas le basque et haut les courts
vendredi 25 février 2005, par ,
David Haristoy, « fils de basque dépaysé », carbure à l’eau. Nico, notre Monsieur Cinéma à nous, l’asperge d’un flot de questions torrentielles. Après un tour de chauffe, David plonge dans le bain de ses deux amours : le théâtre et le court métrage. Ca coule de source...
Arte plus fakt
Dès l’âge de 10 ans, David prend des cours de théâtre à la Maison Pour Tous, actuellement l’Espace Colucci. Un coup de griffe pour constater que ce lieu « n’est pas le meilleur endroit pour diffuser la culture. » Il y travailla comme animateur et organisa des « soirées cinoches ». Prémonitoires. C’est pourtant grâce aux cours de Jean-Claude Moncys, enseignant dans ce lieu-dit culturel, que David effectuera ses représentations théâtrales locales. Aidé de son pote « Fred » (Frédérique Lacoste), il rédige des scénarii. « On s’est aperçu que notre écriture était entre le théâtre et le cinéma. » L’idée de créer un patchwork original mixant projection de courts métrages et sketchs humoristiques fait son chemin. La compagnie Artefakt est créée en 2002. Faut dire que « Foutrack » était « un nom pourri » ! Avec Laurent, le frère de Frédérique et Romuald Perinet, le quatuor se lance dans l’organisation d’un festival de courts métrages sur Montrouge. Acte premier le 12 novembre 2004. « En discutant avec des réalisateurs, on a vu qu’il y avait un manque en matière de diffusion. Et sur Montrouge, il y avait très peu de choses en vidéo. »
Fenêtre sur courts
Le quartet récidive par un coup double : un festival de courts le 18 février 2005 suivi, la semaine d’après, de « Bienvenue à Ricarville », projection spectacle de leur cru. « Notre objectif c’est d’aider le cinéma amateur pour que les auteurs se fassent connaître. » Les soirées projection servent de « déclencheur », de « tremplin en musique », de « scène ouverte au théâtre. » Bien loin des réseaux de distribution traditionnels. Une démarche alternative revendiquée. Le souci aussi du « rapport avec le grand écran et d’entendre les réactions du public. » Le festival se veut un moment d’échanges entre réalisateurs, comédiens et musiciens. Cela permet de faire vivre les courts, de nourrir d’autres projets. Et si un diffuseur est dans la salle... Pour la sélection, « on reçoit les films mais on ne les regarde pas. Puis on se fait une soirée spéciale avec les bénévoles de l’association. Ce qui importe c’est le premier regard, la première sensation. » Et côté amateurs, les films sont à la hauteur : « On a été étonné de la qualité des films. Il y en a de bonne facture. » Certes, le jeu est parfois fébrile mais les scénarii fusent d’ingéniosité, d’imagination. Et de citer « Le métro dans les étoiles » de Guillaume Grimonprez en exemple.
Court circuit
Pour être diffusé ou pour diffuser des courts, mieux vaut être connecté aux bons réseaux. La Compagnie Artefakt a développé ses tentacules : participation au festival d’humour de Montpellier en 2003 (Court-Medie) et première sélection surprise, prospection sur le net (notamment avec repaire.net dédié à la réalisation vidéo numérique, échanges avec des associations estudiantines (Ciné Sept de Censier), dépôt de courts à Vidéon (centre de ressources pour télévisions locales situé à Evry), animation de stages vidéo en Vendée auprès de l’association Art Atlantique, publication dans « 92 express », affichage massif dans Montrouge et préparation d’un site Internet... Un véritable court du monde de la vidéo !
C’est court mais c’est bon
Outre son rôle d’organisateur de festivals, Artefakt écrie et réalise des films en vidéo numérique. « Techniquement, on travaille en caméra mini DV. » Une Canon XM2 pour les intimes. « On aimerait se payer un écran vert pour faire des effets spéciaux. » Si le recto théâtrale de la compagnie tourne autour de la « comédie de boulevard », de « l’impro spontanée », le verso cinématographique de David penche pour le cinéma américain. « Dans nos références, on a le Seigneur des anneaux. » Un peu long pour faire court. En tout cas, pas du genre à se masturber la tête.
Du coup, la Compagnie cherche a se faire plaisir et à faire plaisir : le comique aidant. Et dans le genre, « c’est surtout le sexe et le scato qui font référence. » Ames sensibles, vous allez rire : burlesque, gags visuels sont au programme. Parmi les œuvres de la Compagnie, on comptera « Quai des brunes » racontant l’anthologie d’un certain Jean Gobelin avec sa célèbre réplique « Attention mais si tu me les brises, je t’envoie un coup de tatane dans les valseuses », en guise de vraie fausse pub « Beniat Auto », un projet de parodie de l’inspecteur Derrick intitulé « L’inspecteur Helmut ». Paradoxalement, « notre meilleur film, le plus abouti, décalé, Docteur Labuse en référence à l’atmosphère de Fritz Lang des années 50 n’a pas été pris » au Court-Médie. Avec David, faire un film, aussi court soit-il, devient un jeu d’enfants : « En travaillant, on se forme l’œil. Comme on bosse ensemble, on sait ce que l’on veut. On tourne vite et bien car on est très peu nombreux à la technique. Une caméra, les lumières et c’est parti. Comme on s’est formé à l’improvisation, on a des gens disponibles mentalement. » Et de préciser que « les tournages se font à l’arrache. »
Retour vers le futur
David maîtrise le cinéma. A minima il en a tiré un diplôme d’histoire de l’Art option cinéma. Question références, il est intarissable : Minimum overdrive, Duel, Star Wars, Matrix, Brazil, Ghost in the shell, Blade runner, Mad Max... Notre homme de salles obscures a étudié le design en science fiction, soit « le travail sur le transfert de l’objet et du décor ». Ainsi a-t-il disséqué les films Démolition Man, Le cinquième élément et Akira. Et de se lancer dans des explications sur le futur des objets (la récupération, l’esthétique de l’abîmé) et de jongler avec des spécificités techniques ("le streamline", l’effet "bullet time")...
On aurait pu discuter encore des heures. Mais nos verres étaient vides. Et tôt ou tard, il faut savoir faire court.