Un faucheur d’OGM à Montrouge
Montbouge a rencontré un arracheur d’OGM. En fait, il est plutôt venu à nous en proposant cet article, répondant ainsi à notre appel de participation au journal. Voici la version de cette (presque) interview non imaginaire de Pierre Colas, véritable arracheur d’OGM et de surcroît Montrougien...
Montbouge : Comment devient-on faucheur d’O.G.M. à Montrouge ?
Pierre : Oui je comprends que ça peut surprendre mais j’y suis venu naturellement.
J’ai entendu parler des algues de l’aquarium de Monaco dont les rejets infimes en Méditerrannée posent maintenant un vrai problème. En proliférant elles détruisent le milieu naturel.
Après, j’ai eu l’occasion, sur le Larzac en aout 2003, de rencontrer des membres de la Confédération Paysanne qui lançaient le mouvement des Faucheurs volontaires d’O.G.M. Mais pour me décider à participer il me fallait comprendre et c’est dans la région parisienne que j’ai assisté à une conférence de Christian Vélot, Maître de Conférences, Génétique Moléculaire. Le lien avec les petits déchets rejetés en Méditerrannée était évident. La culture d’O.G.M. en plein champ c’est la possibilité pour une nouvelle plante de se répandre dans la nature et là, impossible de stopper sa progression.
Mb : Mais tu dis "en plein champ" donc les faucheurs ne sont pas systématiquement contre les O.G.M.?
P. : Bien sur, les O.G.M. en milieu confiné c’est sans danger, l’insuline humaine produite en labo c’est formidable.
Mb : Et alors tu fauches à Montrouge ?
P. : Non, pas à Montrouge. Mais j’ai fauché à Marsat, à coté de Clermont-Ferrand en août 2004 . Nous étions quelques centaines, mais très représentatifs des différents milieux sociaux, professionnels et âges.
Il y avait des familles avec le chien et un enfant ou une grand-mère marchant avec une canne. Une vraie ambiance populaire.
Mb : Et comment votre fait d’armes s’est il terminé ?
P. : Oh bêtement. Les gendarmes ont pris quelque meneurs connus dans la région et ils ont emporté un brigadier prétendument blessé. Nous avons tous suivi, à la gendarmerie de Clermont et réclamé d’être avec eux sous les verroux.
Mb : C’est gonflé et ça a marché ?
P. : Non, après une attente type feux de camp, avec chants révolutionnaires accompagnés à l’accordéon et quelques Bourrées pour rester couleur locale, les prévenus sont ressortis et nous nous sommes séparés.
Mb : Et après ?
P. : Il a fallu attendre décembre pour qu’un procès des seuls inculpés soit fait à Riom. Les faucheurs qui avaient pu se libérer étaient présents pour comparaître volontairement et le Tribunal Correctionnel les a "accueillis". Mais le procureur a fait appel et nous nous sommes tous retrouvés en audience fin mars 2005 : Arrêt attendu pour le 19 mai prochain.
Mb : Ça n’en finit pas ton histoire !
P. : Hélas ! Tu vois ce qui est révoltant c’est la pression politique sur les préfets, les gendarmes et les procureurs pour refuser la désobéissance civique et concentrer les sanctions sur quelques meneurs. En chargeant leur responsabilité avec de faux blessés, comme ce brigadier dont les blessures sont différentes chaque fois qu’elles sont évoquées en justice !!!
Mb : C’est une affaire à suivre mais il faudra que tu m’expliques plus clairement les risques que représentent les O.G.M. en plein champ.
P. : Le risque prend des formes multiples. Une nouvelle plante, comme toute vie, cherche à se reproduire. Elle va donc semer ses graines et disperser son pollen, donc concurrencer d’autres plantes telles que les cultures "BIO" et donner naissance à des variétés nouvelles dont les caractéristiques peuvent les rendre nocives ou allergisantes. C’est vraiment l’histoire de l’apprenti sorcier. Apparition de plantes résistantes aux désherbants, le cas a été constaté aux U.S. et pourquoi pas des plantes contenant des insecticides que tu vas manger, ou donner à des animaux que tu vas manger. C’est la chaîne alimentaire et c’est toujours nous qui sommes en fin.
Mb : Tu veux me couper l’appétit ?
P. : En matière d’appétit le pire c’est que la possibilité d’échapper en consommant du BIO risque de disparaître. Les deux modes de cultures sont incompatibles et la pollution par le pollen fait perdre le caractère BIO. Si les O.G.M. envahissent nos campagnes le BIO disparaît et les agriculteurs qui font l’effort de cultiver ces produits de qualité ont tout perdu car aucune assurance ne veut couvrir le risque de pollution par le pollen d’O.G.M.
Mb : Je me demande si je ne vais pas me joindre aux faucheurs ?
P. : Là tu vois ce serait même plus constructif que tu ne le crois, car pour calmer les Faucheurs, Perben a alourdi les peines encourues en cas de récidive, ce qui nous oblige à renouveler constamment les Faucheurs.
Le pouvoir politique cherche une position tenable face à la désobéissance civique. Aujourd’hui, grâce à l’objectivité de certains tribunaux, ce mode de réaction de la population, sur des sujets où son choix est ignoré, apparaît au grand jour. Si les comparants volontaires sont jugés comme ils le demandent c’est plusieurs centaines de places qu’il faudra trouver en prison. C’est plus difficile que de se limiter à José Bové.
Mb : Tu me diras si tu veux des oranges ?
P. : Je te tiendrai au courant.